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Phénomène de société Dans le Nord, les porcs de la discorde dans une campagne qui change

Des associations de riverains se lèvent dans le Nord contre l'installation ou l'extension des élevages de porcs, une fronde révélatrice aussi bien de l'agrandissement des exploitations porcines que du repeuplement des campagnes.

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En cause, les projets d'implantation de deux élevages belges d'environ 3.000 et 2.000 bêtes dans les villages de Bambecques et d'Houtkerque, sur la frontière avec la Belgique, ainsi que l'extension d'une porcherie française à Noordpeene, de 500 à 3.000 bêtes environ.


« En 2003, deux habitants s'étaient manifestés lors de l'enquête publique pour une nouvelle porcherie. L'année dernière, ils étaient 200 », note le maire d'Houtkerque Francis Behaegel (PS). L'arrivée des "néoruraux" change la donne.
(© Photo Terre-net Média)

"Le problème, c'est que l'agriculture est en train de devenir une industrie alors que les villages s'urbanisent à nouveau", résume Edmond Kociszewski, président de Defi (Défense de l'environnement en Flandre intérieure), une des associations qui sont montées au créneau. A Houtkerque, un jeune couple a eu la désagréable surprise d'apprendre, en septembre 2009 --deux mois après avoir acheté leur maison-- que des éleveurs belges allaient installer une "porcherie industrielle" à une centaine de mètres sur un site inactif depuis huit ans. Malgré l'avis défavorable de l'enquête publique, le préfet du Nord a donné son aval. Defi, qui revendique le soutien de 26 familles dans le village, a déposé un recours au tribunal administratif. Les riverains estiment que la route, large de 2,5m, n'est pas adaptée au trafic que suppose un élevage de cette échelle. "Les gosses vont se prendre un camion et la chaussée va s'affaisser", s'étrangle M. Kociszewski, qui n'exclut pas d'en venir à des "méthodes à la José Bové" s'il était débouté. Sans parler du bruit et surtout des odeurs. "J'ai marié mon fils un jour d'épandage du lisier (le mélange liquide de déjections) dans les champs alentours", raconte un habitant. "Ca a un peu gâché la fête"... Ce qui est en cause pour les associations, c'est la taille des exploitations. "Pourquoi ils ne s'installent pas en zone industrielle ? Ils seraient tranquilles", suggère M. Kociszewski.

La population rurale du Nord a augmenté de 2.000 habitants

« C'est vraiment pas de bol. Mais honnêtement, les gens ne supportent plus rien. »

"Le volume des exploitations a augmenté ces dernières années", confirme le responsable du service porcs de la Chambre d'agriculture du Nord, Jean-Marie Vanvincq. Si le nombre d'éleveurs dans le Nord a pratiquement été divisé par deux entre 1998 et 2006, le nombre de truies par exploitation est passé de 60 à 100. "Mais par rapport à nos voisins belges et néerlandais, ce sont des volumes moyens. Ca n'a rien d'industriel." D'ailleurs, Houtkerque a déjà cinq ou six autres exploitations du même volume que celle prévue.

La mobilisation pourrait donc plus s'expliquer par le repeuplement des campagnes, l'arrivée des "néoruraux", sous l'impulsion de communes en mal d'argent et de citadins fuyant les centres urbains. La population rurale du Nord a augmenté de 2.000 habitants entre 1999 et 2006, après une chute constante durant les 40 années précédentes. Le maire d'Houtkerque Francis Behaegel (PS) dénombre 50 nouvelles habitations dans sa commune depuis cinq ans. "En 2003, deux habitants s'étaient manifestés lors de l'enquête publique pour une nouvelle porcherie. L'année dernière, ils étaient 200", note-t-il. "Je comprends la dame qui habite juste en face" du futur élevage d'Houtkerque, déclare pour sa part un éleveur local ne souhaitant pas être identifié. "C'est vraiment pas de bol. Mais honnêtement, les gens ne supportent plus rien."  

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